Un ancien cadre de TikTok accuse l’entreprise de collaborer avec les autorités chinoises


Le PDG de TikTok, Shou Zi Chew, devant la commission de l’énergie et du commerce de la Chambre des représentants au Rayburn House Office Building sur la colline du Capitole, le 23 mars 2023, à Washington, DC.

Le témoignage de Yu Yintao pourrait faire mal à TikTok : ancien directeur de l’ingénierie de ByteDance aux Etats-Unis, il accuse la maison mère de TikTok de partager les données de certains utilisateurs avec les autorités chinoises. D’après lui, le Parti communiste dispose d’un « comité » au sein de l’entreprise, qui peut donner l’ordre de censurer certains sujets, ou accéder aux informations personnelles de certains utilisateurs. D’après la déposition de M. Yu, qui a attaqué ByteDance auprès d’un tribunal américain, début mai, pour contester son licenciement, et a complété ses déclarations début juin, les ingénieurs chinois de l’entreprise disposent de l’accès à l’ensemble des communications des utilisateurs, mais aussi à leur position géographique, leurs communications et leur adresse IP, et ils ont partagé ces informations avec des représentants des autorités chinoises, notamment pour espionner des manifestants hongkongais.

Ce témoignage de l’intérieur vient remettre en cause les efforts de TikTok pour convaincre le monde de son indépendance vis-à-vis de l’Etat chinois. En France, les membres d’une commission d’enquête du Sénat ont insisté sur ce point lors d’une audition de représentants de la plate-forme, jeudi 8 juin. Le directeur des affaires publiques de TikTok France, Eric Garandeau, a tenté de les rassurer, affirmant, par exemple, que la directrice générale Zhao Tian, citoyenne canadienne et chinoise, n’a « aucun rôle opérationnel dans l’entreprise ».

En mars, les élus américains avaient soumis à la question le directeur général de TikTok, Shou Zi Chew, qui avait tenté de démontrer l’indépendance de la plate-forme internationale de sa maison mère, ByteDance, basée à Pékin. Sans convaincre : l’application, qui compte 150 millions d’utilisateurs aux Etats-Unis et plus d’un milliard dans le monde, est toujours en sursis aux Etats-Unis, où l’Etat du Montana l’a déjà interdite (sans effets concrets pour l’instant). En décembre, ByteDance avait reconnu avoir espionné les smartphones de deux journalistes américains qui enquêtaient sur l’entreprise.

« Accès divin » pour le Parti

Le premier témoignage de Yu Yintao, qui a grandi en Chine mais vit désormais en Californie, est apparu le 12 mai, dans le cadre d’un litige concernant son licenciement par ByteDance en 2018. L’ancien cadre affirme avoir été mis à la porte après avoir dénoncé une « culture du non-droit » au sein de l’entreprise, citant, par exemple, le vol de contenu à des plates-formes concurrentes comme Instagram ou Snapchat, et la création de faux comptes pour embellir les statistiques de l’entreprise. Il affirme aussi avoir constaté, lorsqu’il travaillait au siège chinois de ByteDance, que la version chinoise de TikTok, Douyin, mettait en avant des vidéos appelant à la haine contre le Japon – un thème très courant sur les réseaux sociaux chinois. Si la censure des contenus et l’accès aux données des utilisateurs par la police sont courants en Chine, l’entreprise prétend que ce n’est pas le cas pour TikTok, qui n’est disponible qu’à l’étranger. Et elle affirme que les contenus de Douyin et de TikTok sont hermétiquement séparés.

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Catégorie article Politique

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